El-Ferîd . Ainsi que l'indique son nom, cette tombe est isolée et occupe presque toute une face d'un grand rocher qui se dresse dans la plaine, au sud de qasr el-Bint. Son aspect a frappé tous les visiteurs et déjà on connaissait cette façade par deux croquis de Doughty et d'Euting (1). La photographie que nous en publions ne fera pas double emploi avec les dessins de nos prédécesseurs et donnera une idée plus adéquate du monument. Celui-ci est l'un des plus larges, sinon le plus large de tous ceux du Heger et sa hauteur non plus n'est guère dépassée. C'est le seul qui ait quatre pilastres sur le devant; ils étaient nécessités par la grande largeur de la façade. L'entablement et toute la partie supérieure rappellent les grandes tombes de qasr el-Bint. La corniche de l'architrave est remarquablement simple; le corps de moulures au-dessus de la frise est très en saillie; nous avons retrouvé maintes fois les mêmes profils. Le dernier gradin, dans le haut, de l'escalier de gauche, a été bâti parce que le rocher faisait défaut.
(1) DOUGHTY, Travels..., I, p. 116; EUTING, Nabat. Inschr., p. 16, fig. 12 .
Tout le bas du tombeau est inachevé; à peine a-t-on commencé à ébaucher le portail qui aurait eu, semble-t-il, la forme ordinaire. On voit déjà les deux vases et l'aigle sur les acrotères du fronton. De grosses pierres alignées de chaque côté de la porte ont intrigué beaucoup de gens. On les faisait admirer à Doughty en lui disant que c'étaient là les sièges des conseillers de la ville (1), d'où le nom de Mahal el-Megles « lieu du conseil », donné à cette cour. Nous avons examiné de près ces prétendus sièges, sur lesquels notre attention avait été attirée par le croquis très accentué d'Euting, et nous y avons reconnu de vulgaires blocs de rocher, découpés aux trois quarts, mais qu'on n'avait pas achevé de détacher de leur lit d'assise au moment où les travaux furent interrompus. Il y en a cinq du côté gauche. Celui sur lequel un personnage est assis dans la photographie est coupé au milieu de la longueur; les trois suivants, presque intacts, sont dégagés en partie de la façade et isolés par des entailles pratiquées au pic. Il ne restait qu'à introduire un coin dans ces entailles et à frapper un peu pour détacher le bloc. Le dernier de la série s'est même détaché par le seul fait de son poids, le banc inférieur du grès, de très mauvaise qualité, s'étant effrité peu à peu sous l'action de la pluie et des vents. Ceux du côté droit ne tarderont pas à avoir tous le même sort; déjà le quatrième s'est affaissé et les trois premiers sont dans un équilibre assez instable.
Intérieur : chambre inachevée mesurant en moyenne 4,50 m X 4 mètres; aucune trace de sépulture.
Ce tombeau n'est point daté ( Inscr. nab., n° 21) ; néanmoins tout porte à croire qu'il est contemporain des autres grands monuments du Heger et plus probablement des derniers creusés qui n'ont pas été achevés, comme D ou B 23 . Il doit appartenir au début de la seconde moitié du 1er siècle de notre ère.